Drame conjugal à la Destrousse.

Le contexte conjugal

Une dizaine d'années avant le drame, Mme veuve Battiet, née Jeanne Manuele, alors âgée de 54 ans, vint passer l'été à la Destrousse avec ses deux enfants. Ces derniers firent la connaissance des trois filles et du fils, de M. Antoine Caillol, un maraîcher aisé et veuf lui aussi depuis plusieurs années.

Antoine Caillol, né à la Destrousse le 25 septembre 1872, avait épousé le 30 octobre 1894, à Peypin, Marie-Rose Rancurel dont il eût 5 enfants : Rosalia (1895), Marie-Rose (1896), Louis (1897), Elisa (1899) et Marius (1900).
Malheureusement, Marie Rose devait décéder peu après, et Antoine et ses 4 enfants (Marius était décédé) allèrent s'installer à La Destrousse.

Plusieurs fois, des veillées réunirent les deux familles et des projets matrimoniaux furent alors échangés entre Jeanne et Antoine. Leur mariage ayant été célébré, le cultivateur partagea ses biens entre ses quatre enfants, se réservant toutefois une parcelle de terrain et un pied-à-terre dans la maison occupée par son fils.
Le nouveau ménage quitta alors la Destrousse pour venir s'instaler à Marseille au 49 du boulevard Chave. M. Caillol qui vivait de ses rentes et d'une pension allouée par ses enfants, montait de temps à autre avec sa femme, à la Destrousse où tous deux passaient quelques jours, surtout à la belle saison.


Le drame

Or, en 1935, la mésentente éclata dans le ménage pour une question d'intérêt. A la suite de plusieurs disputes, les époux décidèrent de se séparer. C'est alors que le retraité revint habiter à La Destrousse, dans sa maison du quartier Vert-Pré, en bordure de la route du Grenadier.
A plusieurs reprises, Mme Caillol demanda à son mari une pension qui lui fut toujours refusée.
Voulant avoir une dernière entrevue avec celui avec qui elle était séparée, elle se rendit le 6 octobre 1936 à la Destrousse. Tout d'abord elle descendit chez la fille de son mari Elisa, devenue Mme Formillier, puis, le lendemain au soir, elle alla trouver son époux dans son mas, distant de 200 mètres du village.
Une dispute éclata. Elle se prolongea fort tard dans la nuit, après quoi tous deux regagnèrent leur chambre respectives.

Madame Caillol se leva le matin suivant, le 7 octobre, vers les 6 heures et se mit à faire la vaisselle. Vers les 7 heures son mari fit son apparition dans la cuisine, un fusil à la main et sans que la malheureuse se douta un seul instant du danger qui la menaçait, elle reçut presque à bout portant une décharge de plomb dans la nuque. Elle tomba comme une masse sur le sol, morte.
La détonation attira l'attention de sa belle-fille qui travaillait dans le jardin. Au moment où elle allait pénétrer dans la maison, elle rencontra le meurtrier qui sortatit tranquilement.
- Père, lui dit-elle, sur qui as-tu tiré ?
- J'ai fait ce que je devais faire, lui répondit-il. Va dans la cuisine tu verras.
Et pendant que la jeune femme pénétrait dans le mas, M. Caillol se précipitait dans l'écurie, prenait une corde et partait en courant à travers champ.


La maison où s'est déroulé le drame.

Après avoir parcouru 200 mètres, il attacha la corde à un amandier, passa le noeud coulant autour de son cou et se laissa aller. La mort ne voulait pas de lui car au même moment, un soldat permissionnaire, Jean-Marie, dit "Tiercé", qui avait suivi le meurtrier coupa la corde.
Furieux, le vieillard prit une pierre et la lança au visage de son sauveur. Après quoi il reprit sa course à travers champs. Au bout de cinq minutes, il rencontra un chasseur, M. Marius Tremallat, à qui il demanda de lui donner son fusil. Ce dernier refusa et une lutte s'engagea. Voyant qu'il n'était pas le plus fort, Caillol n'insista pas et s'enfonça dans la colline.

Un puits profond de 14 mètres se présenta à lui. Sans hésiter il s'y jeta les jambes les premières. La mort, une fois encore le dédaigna, car malgré la chute et le peu d'eau qui se trouvait au fond, Caillol ne se fit aucune blessure !


Le puits où se jeta Caillol.

Le garde champêtre et les gendarmes de Roquevaire, qui avaient perdu un instant sa trace, l'at perçurent au fond du puits, inanimé. Ce n'est qu'au bout d'une heure d'efforts que l'on put le tirer de cette fâcheuse position. Il fut transporté dans sa maison où il ne tarda pas à revenir à lui, pouvant ainsi dire aux gendarmes qu'il ne regrettait pas ce qu'il avait fait mais qu'il regrettait de ne pas avoir réussi à se tuer. Il fut écroué à la prison Chave.

Après cet interrogatoire, M. Bouis, doyen des juges d'instruction chargé de l'affaire, commit le docteur Rousselier, médecin aliéniste, pour examiner l'état mental du meurtrier.
Son rapport, concluant à l'irresponsabilité d'Antoine Caillol, rendu, le magistrat-instructeur rendit une ordonnance de non lieu en faveur de Caillol qui fut interné à l'asile d'aliénés par mesure administrative.


Sources

Plusieurs journaux d'époque dont :


( Source gallica.bnf.fr / BnF )



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